Le marché hypothécaire en 2023 : l'année de la grande récession

Le marché hypothécaire en 2023 : l'année de la grande récession

Avec 2023 dernière nous, jetons un regard rétrospectif. Comment l'année s'est-elle caractérisée en matière de crédit hypothécaire, par exemple ? John Romain d'Immotheker (membre de BZB-Fedafin) présente les chiffres et appelle d'emblée à une révision en profondeur du système de crédit. 

« En ce qui concerne les prêts hypothécaires, il est assez simple de résumer l'année 2023", déclare M. Romain. "C'est l'année de la grande récession, à la fois en termes de nombre de prêts et de demandes. Dans le secteur des nouvelles constructions en particulier, la situation est dramatique, à tel point que les entreprises de construction mettent des projets en attente parce qu'elles ne sont pas certaines de pouvoir les commercialiser. »

Il sort une feuille de calcul pour étayer ses propos. « J'ai les chiffres de la Banque Nationale pour la période allant de janvier à novembre 2023. Il y a eu 91 300 actes passés pendant cette période. Pour la même période en 2022, il y en avait 115 900. Soit une baisse de plus de 21%. Si l'on considère uniquement la nouvelle construction, cette baisse est encore plus importante, atteignant près de 40%, soit une baisse de 29 100 à 17 500 actes. Le montant moyen emprunté a également baissé, passant de 193 417 à 191 446 euros. » 

« BZB-Fedafin nous signale également que les crédits aux particuliers et aux entreprises sont au plus bas. En fait, la situation a conduit certaines banques à tellement durcir leurs conditions d'acceptation que l'octroi de crédits est devenu presque impossible. », ajoute Albert Verlinden, président de BZB-Fedafin.

« 2023 est l'année de la grande récession, à la fois en termes de nombre de prêts et de demandes. »

  • - John Romain, Immotheker

Hausse des prix et des taux d'intérêt

La raison de cette chute du marché est aisément identifiable : elle est due à la hausse des prix de l'immobilier et des taux d'intérêt. John pense toutefois que le pire est derrière nous en ce qui concerne les taux d'intérêt, ce qui rend les taux d'intérêt variables intéressants. « Pas moins de 96% des Belges choisissent un taux d'intérêt fixe, tandis qu'aux Pays-Bas et en Allemagne, la part est bien moindre et a considérablement diminué. Là-bas, beaucoup plus d'acheteurs semblent déjà anticiper une baisse des taux d'intérêt l'année prochaine. »

Il est impossible de dire avec certitude si cette chute aura lieu, mais le CEO d'Immotheker estime que les étoiles soint alignées favorablement. « Au cours des deux dernières décennies, le taux d'intérêt sur une obligation d'Etat à un an était en moyenne de 0,98 %. Aujourd'hui, nous en sommes à 3,60 %, ce qui est très élevé. Selon nos calculs, la probabilité d'une baisse des taux d'intérêt dans les deux ans est d'environ 90 %. Et puis, bien sûr, un taux d'intérêt variable annuel est assez confortable. »

« D'un autre côté, nous ne voyons pas non plus les taux d'intérêt revenir immédiatement aux niveaux historiquement bas de ces dernières années. Sans compter qu'un client n'est pas l'autre. », précise M. Verlinden. « C'est aussi la raison pour laquelle il est si important de se faire conseiller par un professionnel, qui déterminera avec vous les fluctuations que vous pouvez supporter et les conditions qui vous conviennent en tant que client. »

Manque de transparence

Le fait que tant de personnes choisissent encore aujourd'hui des taux d'intérêt fixes s'explique en grande partie par le manque de transparence, de conseils et d'outils de conseil, avance M. Romain. « Les gens ont peur de voir les taux d'intérêt doubler alors qu'ils sont déjà élevés. Pourtant, il existe de nombreux moyens de freiner ces augmentations. A cet égard, les consommateurs ne sont probablement nulle part aussi bien protégés en Europe qu'en Belgique. »

Mais qu'en faisons-nous ? « Rien. », s'indigne M. Romain. « Dans notre pays, 35 % des demandes d'hypothèque ont échoué en 2023, ce qui est une véritable honte. J'entends partout - dans les secteurs notarial, immobilier et financier - qu'il y a une avalanche de dossiers rejetés, mais le motif en demeure souvent un mystère pour le consommateur. Certaines banques utilisent la méthode de la "black box" : le client ne sait jamais quelle personne ou quel algorithme a rejeté sa demande. En vertu de la loi sur le crédit hypothécaire, les prêteurs ne sont pas non plus tenus de justifier au client le rejet d'un dossier, mais seulement de lui indiquer les listes qu'ils ont consultées (comme, par exemple, le CKP, les listes internes et autres). »

M. Verlinden reconnaît que le nombre de dossiers rejetés a été beaucoup plus élevé que la moyenne au cours de l'année écoulée. « Par conséquent, les politiques de souscription des institutions de crédit se sont énormément resserrées ces dernières années et sont devenues beaucoup plus compliquées. Souvent, même les intermédiaires de crédit ne s'y retrouvent pas, ce qui pose un réel problème. BZB-Fedafin évoque également ces problèmes et plaide en faveur d'une politique de souscription simple, transparente et uniforme, afin que la client sache à l'avance ce que l'on attend de lui. »

« Par conséquent, les politiques de souscription des institutions de crédit se sont énormément resserrées ces dernières années et sont devenues beaucoup plus compliquées. Souvent, même les intermédiaires de crédit ne s'y retrouvent pas, ce qui pose un réel problème. »

  • - Albert Verlinden, président de BZB-Fedafin

Rôle de conseil

Les médiateurs, quant à eux, ont un rôle tordu dans cette affaire, estime M. Romain, car ils dépendent des règles de souscription qu'ils connaissent et des commissions que les prêteurs leur allouent, mais uniquement sur les dossiers terminés. « La médiation est payée, mais le conseil lui-même n'est pas rémunéré. Il n'est pas surprenant que, selon la loi sur le crédit hypothécaire, les mots "conseil" ou "conseiller" ne puissent plus être utilisés dans le marketing. Pourtant, en vertu du même code, les prêteurs et les intermédiaires ont une obligation de conseil aux fins de rechercher et d'offrir un crédit approprié au client. »

« Cependant, il n'est pas si facile de passer à un autre modèle de rémunération. En outre, reste à voir si les clients sont prêts pour cela ou s'ils sont disposés à payer deux fois pour un conseil avant de contracter un prêt... De son côté, BZB-Fedafin préconise lui aussi que le conseil soit rémunéré, ce qui ne pourrait qu'en améliorer la qualité. », conclut M. Verlinden.

 

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